Musicales du Luberon Ensemble La Fenice Chœur Arsys Bourgogne Direction Jean Tubery 21 juillet, Ménerbes. Hommage à Giovanni Gabrieli.
C’est un spectacle inédit d’une troupe de musiciens et de chanteurs qui parcourent une église, du parvis au chœur, d’une chapelle à l’autre, selon une chorégraphie sonore aussi mystérieuse qu’envoutante.
C’est une rencontre avec Giovanni Gabrieli, acousticien avant l’heure, formidable théoricien de la stéréophonie et maître de la spatialisation sonore.
Silence…on écoute…
Du fond du chœur de l’église Saint-Luc à Ménerbes, une trompette droite interpelle une autre trompette toute aussi démesurément longue, laquelle, du parvis, lui répond. A ce dialogue aux sonorités éclatantes et glorieuses, viennent s’associer cornets à bouquin, basson et sacqueboutes (trombones à coulisses.) Les cous des auditeurs se dévissent pour assister à la cérémonieuse procession des musiciens et chanteurs en direction des ors du chœur où se tiennent organiste et claveciniste. En modèle réduit, quatre siècles plus tard, voici une immersion sonore dans les clairs-obscurs de la basilique Saint-Marc.
L’église de Ménerbes, transformée en scène théâtrale, voici qui a étonné et séduit le public venu entendre la grandeur de la Sérénissime au temps des doges selon son prosélyte officiel, Giovanni Gabrieli, fin cavalier, contemporain de Monteverdi qui vécut à cheval entre le déclin de la Renaissance et le début de l’ère baroque.
Voici plusieurs décennies que le monde de la musique ancienne s’est emparé de Gabrieli, musicien prolifique et vénéré de son vivant. Jean Tubery, son ensemble La Fenice et le chœur Arsys Bourgogne ont crée la surprise en chantant les louanges d’un compositeur extrêmement novateur aussi bien dans le contenu de ses œuvres que dans les potentiels acoustiques de leur restitution. Il n’est pas exagéré de parler d’extase sonore, résultat de l’extrême complexité des subtils entrelacs musicaux qui émanent des voix et des instruments, ceux demeurés dans le chœur et ceux dans les chapelles latérales. Cette polyphonie rayonnante, réglée au quart de ton par un Jean Tubery dont la science musicale saute aux oreilles, révèle des artistes de tout premier plan. On notera sans que cela nuance notre plaisir, quelques acidités vocales côté sopranos, quelques phrasés défaillants chez les contre-ténors et haute-contre (séparément crédités au générique.)
La musique de Gabrieli qui nous a été offerte, toute en transparence, ne fait entendre aucune gravité liturgique, aucun dolorisme.
Tout ici est une offrande à la splendeur de Venise, à la gloire de ses doges, un hommage permanent aux fastes de la République.
Musiques aux couleurs du Véronèse et du Tintoret, elles sont les plus hédonistes et euphorisantes qui soient.
Des soleils sur la lagune…
© Easyclassic - 22/07/2012
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