Brahms a capella
Les Musicales du Luberon
Concert du 4 septembre 2005
Bonnieux
J. Brahms Œuvres pour chœur mixte a capella
et pièces pour piano op.117 et 118
Chœur de chambre de Wurtemberg
On connaît des mélomanes qui rejettent Brahms en bloc. Le compositeur hambourgeois serait, selon eux, indéfendable à deux titres : d’une part il illustra la musique allemande dans ce qu’elle aurait de plus massive et indigeste et d’autre part, au temps d’un Wagner, il se complût dans les formes les plus conservatrices. Il faut le dire : bien des interprétations brahmsiennes des années 1950 entérinèrent (involontairement) ces reproches tout comme il faut accepter que Brahms fut un compositeur plus influencé par Beethoven que par un Bruckner à peine plus novateur. Avec le résultat que l’on sait.
Soutenir sérieusement de telles accusations, c’est connaître in extenso le legs brahmsien qui est considérable. Et plus on découvre des pans ignorés de sa création, plus le grief de passéisme paraît simultanément légitime et vain.
A preuve, ces œuvres pour chœur mixte a capella très peu données et enregistrées, qui sont des chromos des temps anciens mais de très belle tenue.
A dire le vrai (même si cela n’est qu’un détail) on se serait passé de la lecture préalable des textes qui furent ânonnés sans conviction par une personne passablement godiche. Inspirés d’une littérature aussi datée que vertueuse (béatitudes sylvestres et baisers furtifs…) ils célèbrent une Germanie immémoriale avec ses légendes et ses mythes.
Si effectivement c’est d’un Brahms d’un romantisme très académique dont il s’agit, son inspiration musicale est étonnamment variée.
On y découvre un Brahms intime et rêveur, confident et d’une délicate profondeur. Quelques motifs malicieux parcourent ces chants et romances qui à la longue, créent un climat intemporel plein d’un charme désuet.
Le chœur de chambre de Wurtemberg est une formation sérieuse qui, pour être originale, n’en est pas moins impeccable.
Le travail sur la diction et l’expressivité rendit l’écoute légère et toute accentuation sur les motifs bucoliques et mythologiques germaniques qui font l’essentiel de ces textes fut évitée. Des pupitres homogènes, des passages de relais vocaux fondus dans des lignes mélodiques claires et fluides, des prises de paroles toujours bien a propos, une direction précise et ample...le chœur de Wurtemberg fit plaisir à entendre.
On regrettera un rien d’engagement collectif, notamment la discrétion des voix d’hommes au profit des sopranos à la gauche du chef qui tirèrent un peu la note à elles. Cette formation fut élégante et sobre de bout en bout et il ne nous revint pas en mémoire le mot cruel de Debussy envers Brahms : « Fuyons, il va développer.. ! »
Ces chants et romances furent marqués de pauses au piano qui ne rendirent qu’un hommage assez succinct à ces pièces majeures du répertoire que sont les Intermezzi et les Klavierstücke op. 117 et 118.
Il n’est pas rien d’oser proposer hors saison un répertoire rare.
En ce sens, le passage de ce chœur du Wurtemberg en terre provençale fut un épisode musical réussi. Il illustre la ferveur d’un large public pour le genre choral qui mêle des voix qui font toujours un peu écho à nos rêves intimes de prendre l’air mais parfois aussi le chant à l’unisson.
Gérard Abrial
© Easyclassic - 05/09/2005
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