Marseille Eglise du Sacré Cœur
Vocalises sur les cimes
Le contre-ténor est à la musique baroque ce que la mythologie est à l’opéra wagnérien : inséparable et indispensable.
Alors, quand un récital de musique du 18ème propose, non pas une de ces voix qui visent la stratosphère mais trois organes de ce type, on s’y précipite. Belle initiative du comité Euterpes pour la promotion de l’art baroque en Provence et sa présidente Edmée Santy que ce concert, très couru, très acclamé aussi.
Principal intérêt, outre une programmation axée sur Purcell, Haendel, Vivaldi, Scarlatti, celui d’une rencontre non pas avec un registre vocal qu’on croit stéréotypé, mais avec les profondes différences vocales et expressives de chacun de ces artistes.
Couleurs, timbres, nuances, projection…rapidement l’auditeur attentif aura perçu l’identité de ces voix d’entre terre et ciel.
Pascal Bertin est l’aîné de ce trio. La voix est extraordinairement stable, souple, bien projetée. Le timbre dans le registre grave se fait sombre, ambré, profond.
On sent chez cet artiste les vertus d’un métier bien conduit depuis longtemps déjà et dans des domaines variés (jazz, pastiches, musiques anciennes). La simplicité expressive est du meilleur goût. Pascal Bertin est le contre exemple parfait d’un contre-ténor qui jamais ne minaude.
Roméo Cornélius est jeune artiste plaisant et talentueux. Si la voix est très séduisante, facile, dotée d’un beau legato, elle n’est pas toujours assurée, faute peut-être d’une bonne familiarité avec le texte et la diction manque parfois d’intelligibilité.
On aurait aimé dans le « Music for a while », tube absolu de Purcell, plus d’engagement, de prise de risque, de profondeur en un mot.
Quant à Philippe Jarrousky, (*)une fois encore, il aura été radieux.
Que d’aptitudes à l’art vocal chez ce jeune virtuose.. ! Dire qu’il a tout pour lui serait un vulgaire euphémisme. Quel sopraniste sur les scènes internationales peut rivaliser avec son art ? Empreint des plus grandes beautés, ce talent s’orne de cette vertu si rare dans ce registre : la simplicité, la franchise, le naturel. Quelle musicalité dans ce médium irradiant.. ! Pas l’ombre de ces maniérismes qui rendent parfois l’écoute de ces voix exaspérante.
Ensemble, ces trois artistes auront donné un récital enthousiasmant accompagné par un quintette attentif, bien conduit par un Jean-Marc Aymes parfaitement complice de ces voix qui longtemps après les avoir entendues, se prolongent encore d’un bel écho.
Gérard Abrial
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© Easyclassic - 16/12/2006
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