ORCHESTRE PHILARMONIQUE DE MARSEILLE Direction musicale Li BIAO Piano Fang YUAN
Programme:
ANTON DVORÁK | Carnaval, Ouverture
LI BIAO | Concerto pour percussions
SERGUEÏ RACHMANINOV | Rhapsodie sur un thème de Paganini
MAURICE RAVEL Daphnis et Chloé 2e suite pour orchestre
Concert déconcertant
Le soussigné, à la lecture du menu proposé par l’orchestre symphonique de Marseille, se rendit ce soir là avec joie et curiosité à son dur labeur.
Joie car appréciant les musiques « à programme », le voici comblé : Dvorak, mélodiste de génie, Rachmaninov, par bonheur rétif aux éthers de la modernité dodécaphonique et Ravel, incomparable orchestrateur.
Quant à notre curiosité, elle était mue par la découverte d’un jeune chef asiatique, dirigeant une de ses propres œuvres. Un événement en soi à traiter avec discernement, car une seule partition dépréciée ne saurait contaminer un programme par ailleurs tout à fait séduisant.
Ce qui le fut pour l’Ouverture « Carnaval » de Dvorak que l’on connait au disque comme opus complémentaire à la symphonie du « Nouveau Monde ». Brillante démonstration dans le caractére bohémien, dès ses premières mesures, elle met en valeur tous les pupitres par de rutilants motifs rhythmiques syncopés. Quelques interventions de solistes ( hautbois, flûte, cor anglais…) se distinguent des grandes houles orchestrales que Dvorak composait avec une suprème maîtrise.
L’ orchestre de Marseille, galvanisé par un chef de nature fougueuse, s’en donne à cœur joie.
La Rhapsodie sur un thème de Paganini pour piano et orchestre de Sergei Rachmaninov
nous procure le plaisir d’une rencontre avec une pianiste chinoise qui doit, pour une part, sa révélation à Lawrence Foster, directeur musical de l’orchestre phocéen.
Dire que Fang Yuan révolutionne l’interprétation de cette rhapsodie si liée aux versions historiques* qui instruisirent nos jeunes années, serait inapproprié. En leger retrait par rapport à la baguette abrasive de son compatriote, elle livre une interprétation bien architecturée, claire, souple, raffinée sans maniérisme.
La Daphnis et Chloé de Ravel, « Symphonie chorégraphique », est rarement donnée dans son intégralité. On connait surtout sa 2e suite pour orchestre.
Cette œuvre « une des plus belles de la musique française »( Stravinsky), « une des plus somptueuses partitions de l’histoire de la musique » (De Candé) requiert un traitement digne des porcelaines les plus délicates ainsi qu’une parfaite connaissance de l’extrême raffinement de l’univers ravelien.
Inutile de dresser la liste des vertus orchestrales que l’auditeur un tant peu instruit est ici, en droit d’attendre. Si l’orchestre de Marseille montre ses limites, une part de celles-ci émanent de la direction d’un chef peu familier de cette œuvre. Il en ressort des attaques brusques, des contrastes bien trop soulignés, des tempis instables, une esthétique des moins heureuses.
Opérons un flash-back au profit ( !) du « Concerto pour percussions » du même Li Biao.
Réputé comme virtuose des percussions, le talent de Li Biao se manifeste à l’écoute des cymbales suspendues ou frappées, des diverses caisses, timbales, tambours et autres triangles, mais aussi d’instruments traditionnels chinois de nous inconnus. Bien que réceptifs aux musiques les plus diverses, nous sommes restés à la porte de cette œuvre spectaculaire.
Mais cela est peu car une question demeure sans réponse : où Li Biao veut’'il nous amener, quel est le fil conducteur de sa création ? L’orchestre de Marseille, pourtant pétri de bonne volonté, opte pour un prudent pilotage automatique malgré les efforts d’un chef dont l’énergie à force d’être constamment impétueuse finit par saturer plus qu’elle ne convainc.
Gérard Abrial
www.mailomanes.fr
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* Earl Wild/Horenstein- Graffman/Bernstein
© Easyclassic - 19/11/2016
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