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La Roque d’Anthéron-Récital Boris Berezowski
Evidence. De tous les pianistes qui se produisent sur cette planète du piano qu’est La Roque, Boris Berezowski semble le plus naturellement conformé pour exercer son art.
Tout chez cet athlète parait conçu pour dominer l’instrument : parfaite décontraction du haut du corps, mains fluides et toniques,
articulations exemptes de toute raideur…l’aisance absolue du geste parfait.
Une aisance qui confine presque à une sorte d’élégante nonchalance. Fort de cette prédisposition corporelle, la tête suit.
Et faut-il qu’elle soit bien faite et remplie cette tête aux traits vigoureux, pour donner une telle intensité à un récital composé uniquement de pages brèves, parfois elliptiques.
La nouvelle, on le sait, requiert un contrôle du souffle supérieur à celui du roman.
Si les 6 Moments Musicaux de Rachmaninov sont des merveilles mélodiques (la troisième jouée avec une telle simplicité, une telle pureté sonore fait frissonner le public…)
on ne peut pas créditer tous les Préludes op 32 d’un égal intérêt.
Un jeu prosaïque pourrait engendrer la lassitude. Mais le pianisme intense du beau Boris, sa science des couleurs, du traitement des plans sonores,
place chaque Prélude à des sommets de beauté musical.
Le grand Weissenberg a trouvé en Berezowski un digne successeur.
Des 53 études d’après les Etudes de Chopin de Godowski, Boris Berezowski
a donné 10 de ces paraphrases kaleidoscopiques à l’usage des virtuosissimes.
Sans effort apparent, d’un calme jupitérien, le moscovite transcende la technique pour ne laisser à entendre que la poésie de ces pièces et leur diversité polyphonique.
Acclamé, rappelé maintes fois, l’artiste ne prendra pas congé sur une bluette.
Déclarant sa flamme à La Valse de Ravel, il se lancera dans une interprétation moderne, âpre et incandescente propre à laisser Sissi pantelante et désarticulée.
Entre Boris Berezowski et la musique, c’est d’évidences qu’il s’agit.
Temps fort et admirable de ce festival.
Gérard Abrial
© Easyclassic - 07/08/2004
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