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Doigts d’acier et cœur à découvrir.

Tamara Stefanovich, si elle élevait des loups, pourrait faire une carrière à la Hélène Grimaud tant son physique est plaisant. Mais pas seulement. Son autorité, ses convictions au piano, son énergie rappellent sur ce mode la belle aixoise.
Mais, la jeune serbe, élève de si grands pédagogues, a peut-être les défauts de ses qualités. Sa maîtrise et sa virtuosité sont telles qu’elles laissent peu apparaître l’essence d’une personnalité dont on aurait aimé percevoir les contours. Tout chez l’élégante Tamara est impeccable. Technique si dominée que tout effort de sa part est inaudible, mémoire sans faille, sens de l’architecture des œuvres d’une exemplaire maîtrise, on ne peut qu’acclamer cette instrumentiste. Est-on pour autant entièrement convaincu ? Si son Bach d’introduction ( BWV 898) se laisse entendre mais s’écoute un peu, les Variations Duport de Mozart ne laissent guère de place à une quelconque effusion, épanchement, charme ou rêverie. La main gauche de la pianiste, par ailleurs d’une force expressive remarquable, domine le chant de la droite. L’articulation est si définie qu’elle efface une allégresse qu’on aurait volontiers retrouvée dans la dernière variation.
A la suite venait tout un programme alternant Etudes Tableaux de Rachmaninov et Etudes de Ligeti. En terme de complexité pianistique, tout y est et tout sera dit. Un sans faute. Le grand mérite de Tamara Stefanovich aura été de faire acclamer Ligeti par un public de vacanciers qui ne semblait pas décontenancé par une partition moderne.
Blocs sonores à la géométrie parfaite, rythmes, syncopes, fulgurances des traits, les deux dernières pièces, (Rachmaninov op 39, n°9 et Ligeti livre n° 2 étude n°13) révélèrent encore d’avantage la virtuosité transcendante de miss Stefanovich.
Ce programme de haute voltige pianistique aura révélé une artiste puissante, affirmée, presque virile. Mais Tamara Stefanovich a certainement encore bien plus à nous dire sur elle, non plus sur la grande pianiste qu’elle est mais sur son âme de musicienne.
Sous l’acier des doigts, un cœur palpite et nous prêtons l’oreille.

Gérard Abrial
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© Easyclassic - 02/08/2007