Récital Leif Ove Andsnes
Robert Schumann Pièces pour piano
Franz Schubert sonate n°21.
Le voyage…cette tragique errance dont le terme ne peut être que la mort, Franz Schubert en exploitera le thème tout au long des 31 années de sa brève existence.
Novembre 1828. Tout signe la déchéance physique, le compositeur semi conscient, se hâte d’écrire encore quelques chefs d’œuvre comme autant de messages d’adieu.
De ce passage sur terre marqué par la souffrance et la solitude, Schubert laisse à son piano le témoignage d’un homme résigné, sans amertume, désormais entre deux mondes, celui qu’il quitte et celui qui l’attend.
Et c’est de ces hauteurs qu’il assistera à la tardive reconnaissance de sa fécondité et de son génie miraculeux.
Les trois dernières sonates de Franz Schubert sont parmi les pages les plus bouleversantes de toute la littérature pour piano. L’ultime, en si bémol majeur, culmine à de tels sommets d’émotion qu’elle ne peut procéder que d’une essence surnaturelle. Tout le génie de Schubert s’exprime dans une vaste architecture sonore et spirituelle qui semble abolir le temps, qui émane d’un univers au-delà des sentiments terrestres, un langage qui échappe à la rationalité des mots pour s’épanouir dans l’expression musicale la plus pure.
La sonate D 960 en si bémol majeur, d’une durée de près de 50 minutes se développe en quatre mouvements parcourus d’un souffle continu mais fortement contrasté comme le suggère mélodies et contre-mélodies.
Premier mouvement qui expose l’ineffable beauté des premiers motifs mélodiques traversés d’ombres et de lumières ; andante dont la grande simplicité souligne le poignant dramatisme ; allegro soudain, inattendu, évocation des joies passées ; final « allegro ma non troppo » et rondo-sonate à trois thèmes.
Mais qu’importe l’analyse ! L’esprit est depuis longtemps dans le monde de l’auteur, corps et âme abandonnés au simple sentiment que nous inspire Schubert : la tendresse.
En jouant ces œuvres, Leif Ove Andsnes se mesure aux légendes du clavier schubertien, les Lupu, les Brendel, les Richter, les Serkin.
Qu’attend t’on de lui ? Que dans la simple ferveur d’une interprétation espérée, dans l’intensité des plus beaux silences qui n’aient jamais été écrits, il nous conduise loin, très loin. Hors du temps.
Gérard Abrial.
© Easyclassic - 17/08/2004
|