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Opéra de Marseille Février 2013
Elektra Richard Strauss

Polyphonie psychique

Elektra ? Une tragédie musicale en un acte. Tout comme Salomé, écrit quatre ans avant Elektra.
Ici, le génie de Strauss s’est appliqué à condenser le temps, à maintenir spectateurs et acteurs dans un huit-clos oppressant de moins de deux heures.
A l’intérieur de ce schéma inhabituel, le compositeur s’est interdit toute accalmie. Aucun relâchement de cette transe collective nourrie de cris, d’imprécations, d’appels à la vengeance. Tout espoir d’un retour à la lumière est anéanti.
Au cœur de ce drame signé Sophocle, la terrifiante Elektra. Hofmannsthal, librettiste de Strauss, non seulement lit le grec dans le texte, mais irrigue celui-ci des récents travaux de Breuer et de Freud. Ainsi, après Elektra, le psychisme « médical » fera son entrée dans le monde lyrique pour ne jamais plus en sortir. On le sait, il y a matière…

La plus grande vertu de la mise en scène de Charles Roubaud a été le savant dosage entre l’explicite et l’implicite. Elektra n’est pas constamment dans le paroxysme de la fureur ni dans l’abattement quasi-comateux. Les personnages qui l’entourent sont toujours très justement définis, sans manichéisme.
L’Elektra de Jeanne-Michèle Charbonnet (*) une révélation, possède tous les dons vocaux et scéniques pour poser ses pas sur ceux, légendaires, de Léonie Rysanek ou Waltraud Meier.
La soprano américaine dispose d’une grande et stable projection, d’un médium solide, d’une belle expressivité. Pour ce rôle épuisant, elle dispose d’une santé vocale à toute épreuve. Une performance.
Quant au « casting », il ne souffre d’aucunes faiblesses et le mezzo de Marie-Ange Todorovitch connaît ici une de ses plus convaincantes réussites.
Quant à l’Oreste de Nicolas Cavallier, il joue et chante, comme on le sait depuis longtemps, avec un charisme de chaque instant. Sa carrière en est t’elle pour autant récompensée ? Rien n’est moins sûr.
Dans la fosse, Pinchas Steinberg obtient de son orchestre la « pâte » de Strauss : rutilance, ampleur, ondulation, richesses sonores, expressivité.

Cette Elektra restera dans les mémoires.
Nous en prenons acte.
G. Abrial

© Easyclassic - 14/02/2013