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Musicales du Luberon 2016

Choses lues, vues, entendues.
Les chroniques de Gérard Abrial

« DUOS DRÔLES A L’OPERA »
Dame Felicity Lott- soprano
Eric Huchet - tenor
Maciej Pikulski – piano
Mise en scène Gérard Chambre

J.Offenbach (1819-1880)
E.Chabrier (1841-1894)
V.Kosma (1940) / J.Prévert (1900-1977)
R. Hahn (1874-1947)
M. Yvain (1891 – 1965)
C.Terrasse (1867-1923)

Des arènes enfin sans toros.

Les carrières des Taillades sont une sorte de chaudron minéral circulaire, un étonnant hémicycle qui recèle une acoustique favorisant la projection des voix (celles issues de la programmation des Musicales, notamment.)
Parmi quelques millésimes, certains me reviennent en mémoire : en 2006 un Rinaldo de Handel magistral, Orchestre la Grande Ecurie et la chambre du Roy de Jean-Claude Malgoire et Philippe Jarrouski au mieux de leur art. En 2007, une 9 éme symphonie de Beethoven, révérée par un quintette de solistes enthousiasmants. Plus proches, en 2014, des Vivaldi par un Concert Spirituel dirigé par un Hervé Niquet très inspiré par ces arènes.
Carton plein pour le troisième opus de l’été 2016 des Musicales. 6oo auditeurs présents pour un événement, qui donné comme original, d’Offenbach à Kosma, le fut de A à Z.

Felicity Lott, la grande « Dame »

Placé sous une bonne étoile musicale, ce programme : « Duos drôles à l’opéra » ne pouvait être confié qu’à la personnalité la plus qualifiée pour illustrer ce thème, Dame Félicity Lott.
Eblouissante mozartienne, Maréchale de légende (Chevalier à la Rose de R. Strauss), cette soprano, une des plus distinguées de notre temps, francophone et francophile, n’a cessé de révéler la musique française, celle d’Offenbach notamment.
Au-delà du « Mozart des Champs-Elysées » on doit à Dame Felicity Lott, si ce n’est l’exclusivité du répertoire qu’elle nous donna ce soir, une référence en matière de goût et d’esprit.
Car gardons-nous bien de déconsidérer le genre dit « opérette » A un niveau autre que pour l’opéra, il requiert des moyens vocaux et un talent pour la « commedia del arte » en aucun cas marginaux ou secondaires. Si second degré il y a, c’est souvent celui délicat du double sens.
Felicity Lott, désormais avancée en âge, a conservé intact un formidable abattage, une présence scénique toute de charme et de chic « so british » Voix de soprano encore ductile, suffisamment nuancée, elle rapporte l’histoire d’une longue carrière, celle la plus intelligemment menée. Pour exemple, le choix d’un répertoire qui sollicite essentiellement le médium de la tessiture, et qui ne s’aventure que peu dans les hauteurs.
Disons pour résumer que sa personne, toute en naturelle simplicité et gentillesse, nous a enchanté. Tout comme le ténor Eric Huchet. Celui-ci a fait merveille par ses talents de comédien, jouant sur un physique de bon ourson parfois candide pour restituer un caractère désopilant (l’air des Instruments, Offenbach, l’Ile de Tulipatan) et souvent non sens (Yvain, Air des terres et des coupons et Mascotte d’Audran.)
Bienvenue, l’originalité de la mise en scène aussi simple qu’efficace de Gérard Chambre, inattendu monsieur Loyal.
A son piano, fin élégant, plein de tact, Maciej Pikulski s’y entend à rendre les subtilités de la prosodie de ces textes. Ceux-ci, certes parfois datées, sont à humer comme des draps de lin aux effluves de naphtaline.

Humour ? Plutôt esprit.

Humour, fantaisie, dérision, satire…ces états ne sont pas les dons les mieux partagés dans le monde de la musique dite « savante ». Si les « Leçons des Ténèbres » de Couperin étaient gorgées d’humour, cela ce saurait. Idem pour les terrifiantes Médée ou Elektra. Adoptons plutôt le vocable : « esprit » au sens de « faculté intellectuelle. » Celui-ci baillant plus large, accueillera davantage de styles et d’œuvres.
Pour le mélomane susceptible, voire compassé, cet « esprit » ne lui soutirera guère plus qu’un sourire ; pour celui plus « cool », il le fera rire. Test : observer ses voisins lors du final de l’acte 1 de l’Italienne à Alger.
Mais, je vous entends protester. « Et le répertoire anglais de la Renaissance ? » Bien qu’il recèle quelques saillies, celles-ci relèvent de la marginalité des chants de tavernes. Plus de gaudrioles que d’esprit.
Plus tard, si Haydn a pu glisser quelques espiègleries instrumentales dans ses partitions, il faut s’en remettre à l’opéra-buffa et son comique de situation. Exemples : Cosi, les Noces de Mozart, le Barbier de Rossini.
Mais quelques compositeurs du XX eme siècle, pourvus d’humour ET d’esprit, ont mis en paroles et musique cette bienfaisante disposition. Naviguant entre second Empire aux Années Folles en passant par la Belle Epoque, ce récital, concentré de bonne humeur et de fantaisie, sait ‘il qu’il nourrit une pratique médicale en vogue ? La musicothérapie.

Une perle

^« La musique n’est jamais drôle. Il faudrait être un imbécile de musicien, avec déformation professionnelle pour tirer des effets comiques de l’œuvre d’un compositeur ». Edgar Varèse
Que les varésiens me pardonnent mais, Offenbach, entre autres, aura plus fait pour la musique que les œuvres de Varese, compositeur dont les adorateurs tiennent toujours congrès en un espace proportionnel à leur nombre : une cabine téléphonique.

Help, please…

Comme chacun sait, les occasions d’une rencontre avec une « Dame » ennoblie par la reine d’Angleterre sont, sous nos cieux, assez fréquentes. Aussi, dois-je avouer mon ignorance en cette matière protocolaire. Comment m’adresser à cette intimidante personnalité ? « Chère Dame ? Votre excellence ? Lady ? Hello honey ? »
Réponse bienvenue.

Choses lues

Malgré des traits des plus austères qui soient, c’est le musicien le plus spirituel de l’univers de la musique classique.
Sens de la formule, autodérision, ironie acide, goût du non sens, Alfred Brendel s’en donne à cœur joie dans ce recueil de 90 mots que ce bel esprit revisite.
Un régal…
Alfred Brendel, Abécédaire d'un pianiste. Ed. Christian Bourgois. 160 p.

Mardi 2 août 19h
Notre Dame De Pitié de Saignon
Récital de Macej Pikulski, piano

Programme :
F.Chopin Andante Spianato et Grande Polonaise en mi bémol majeur, Op. 22
Ballade n° 4 en fa mineur
F.Liszt
Un sospiro
F.Schubert F. Liszt
Transcriptions F. Schubert
Die Stadt
Der Aufenthalt
Ständchen
Auf dem Wasser zu singen
R.Schumann- F.Liszt
Mondnacht
Widmung
S. Rachmaninov
3 Études – Tableaux op.33

© Easyclassic - 01/08/2016